Installation > Les tentes hâtives - "A mon seul désir", 2013
         


Les tentes hâtives  - « A mon seul désir »
Résidence jumelage au collège d’Athis de l’Orne avec l’association Vaertigo, mars-avril 2013.
Avec la performance chantée par la plasticienne, performeuse et chanteuse Solveig Robbe, juin 2013.


Durant cette résidence, j’ai souhaité explorer les notions d’abri, d’habitacle et plus particulièrement de campement en travaillant à partir de tentes.

Les tentes sont comme des origamis : une question de plis et de replis. A notre époque, c’est un objet manipulable, transformable, transportable et qui se développe dans l'espace comme par magie. L'objet « tente » me permet de réactualiser de nombreux fantasmes d’enfance : improviser un habitacle instantané (déploiement), construire et déconstruire immédiatement comme pour un jouet, pouvoir habiter en tous lieux et être chez soi partout, donner réalité aux archétypes de la grotte, du nid ou de la hutte.
La notion de seconde peau inhérente à cet objet m'intéresse particulièrement : en effet la frontière entre espace extérieur/environnement et espace intime est réduite à son minimum à cause de la faible épaisseur des parois de ce logis précaire. Ainsi j'ai travaillé la structure et l’enveloppe de mes tentes comme des architectures au plus proche des corps, et au plus proche des rêves qu’elles incarnent.

« Par ses caractéristiques, le camping est une sorte de domus où chacun investit symboliquement ses rêves, valorise les impedimenta de son cerveau reptilien, et signifie sa présence au monde. Ce nichage, qu’il soit intermittent ou pérennisé, permet de faire fonctionner, avec peu d’intermédiaires, la boîte aux images et aux souvenirs. »
Olivier Sirost, Habiter en camping ou l’art du paysage.

La tente de A mon seul désir (tapisserie médiévale de La dame à la Licorne) a constitué ma première référence pour son énigmatique univers. Mais durant mes recherches d'autres liaisons se sont créées, et tout particulièrement avec la grotte du « Paradis » de Jérôme Bosch. Ces tableaux pour leur caractère fantastique et charnel ont inspiré la linogravure qui a servi de matrice à 130 impressions textiles.

Les Tentes hâtives, veulent conjuguer bi-dimension (son enveloppe élaborée à partir des linogravures) et volume (sculpture textile déployée dans l'espace). Les Tentes hâtives sont constituées de deux tentes campées dans le patio du collège comme les habitacles provisoires de rêves latents, se reflétant dans les vitres de ce grand aquarium. L'une est vraiment hâtive, déployée instantanément et rappelant les campements des rois dans la peinture classique. L'autre, à l'inverse, a déployé le temps, très longuement élaborée gravure par gravure, comme les feuilles posées une à une pour tapisser le toit des premiers abris, les huttes. Enfin, le mouvement de cette sculpture est primordial, afin qu'elle apparaisse organique et comme vivante. Le vent l'anime et tout en la gonflant, lui donne une respiration.

Enfin, la participation de Solveig Robbe a permis de développer cette proposition plastique, lors d'une performance où le mouvement du corps et la voix se conjuguaient pour produire une métamorphose.

Marie-Noëlle Deverre